Conseils et recommandations de Cheikh Ahmed Tijani, qu’Allah l’agrée

Par le Nom d’Allah le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux. Et que les prières d’Allah ainsi que le salut soient sur notre Maitre Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons. Louange à Allah, que Son éloge soit élevé et que soient sanctifiés Ses qualités et Ses noms.

Cette lettre est adressée à l’ensemble de nos frères, disciples de Fès et des alentours, qu’Allah vous protège de toutes les épreuves, des difficultés et des tentations. Amin. Que la paix et la miséricorde d’Allah ainsi que Sa bénédiction vous couvrent de la part de celui qui vous aime, Ahmed Ibn Mohamed Tidjani.

Je vous recommande, ainsi qu’à moi, ce qu’Allah commande et ordonne et qui est de préserver les limites sacrées et de veiller à l’accomplissement de l’ordre divin, à la mesure de votre capacité, car certes, à cette époque, les principes de l’ordre divin se sont écroulés totalement ou en partie et les gens aiment passionnément ce qui leur est pourtant nuisible dans ce bas-monde et dans l’au-delà. 

On constate que plus aucun éveil ne permet d’orienter les cœurs vers Allah – qu’Il soit glorifié et exalté – ni même de s’arrêter aux limites sacrées d’Allah dans le domaine des commandements et des interdictions. Il ne reste plus désormais à quiconque à notre époque le pouvoir d’appliquer l’ordre d’Allah dans l’ensemble de ses aspects, excepté pour celui revêtu de la parure de la connaissance d’Allah ou celui qui s’en approche. Puisque les choses sont comme nous les avons évoquées, le serviteur ne pouvant trouver d’échappatoire au décret d’Allah, alors celui qui est mêlé de blanc et de noir est meilleur que celui qui est complètement noir.

Délaissez la désobéissance à l’ordre d’Allah autant que vous pouvez, exécutez son ordre selon vos capacités et accomplissez pour vous-mêmes plusieurs expiations de péchés, de nuit comme de jour. Ce sont ici plusieurs recommandations et de multiples exhortations que nous vous avions données lors de nos premiers conseils et qui furent un aperçu suffisant.

À cela s’ajoute Hisbou Saïfi pour celui qui l’a pris comme oraison, matin et soir, au minimum une fois et sans limite maximale ; ainsi que Mousaba’at el ‘Achra pour celui qui l’a adopté comme oraison, matin et soir ; et aussi Salat Fatihi lima oughliqa, au minimum cent fois le matin et le soir. Dans ce domaine, aucune action, pour ceux qui œuvrent, ne peut être supérieure, et aucun espoir, pour ceux qui espèrent, ne peut être plus comblé.

Soyez constants dans vos prières obligatoires en groupe et prenez-en soin car elles sont la cause permettant d’écarter les malheurs qui doivent s’abattre, sauf de toutes petites exceptions qui nécessitent une punition, et certes Allah aidera d’une aide immense celui qui sera constant en cela. Combien de fois l’a-t-Il soutenu lorsqu’il fut mis en déroute ? Combien de fois lui a-t-Il voilé ses défauts ? Combien de fois lui a-t-Il pardonné ses fautes ? Combien de fois l’a-t-Il saisi par la main dans tous ses faux pas ?

Je vous recommande d’être assidu dans le dhikr d’Allah et la prière sur le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) de nuit comme de jour, selon votre capacité et selon ce qu’Allah vous octroie comme temps libre et énergie, sans excès ni insuffisance. Ayez pour but, à travers cela, la glorification de la valeur d’Allah et de Sa grandeur ainsi que celle de Son Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), et présentez-vous devant la porte d’Allah en ne demandant que Sa satisfaction, non en vue d’un bénéfice. Celui qui œuvre de la sorte, tout comme celui qui est assidu dans ses prières en groupe, aura une attention immense d’Allah, il trouvera la bénédiction dans un avenir proche et lointain, il découvrira le goût et la saveur espérés, ceci dans les particularités et les secrets.

Je vous recommande de préserver l’aumône, de nuit comme de jour, si vous le pouvez, même avec un sou en cuivre ou une simple bouchée, mais ce, après avoir veillé à l’accomplissement de vos obligations financières. Certes, l’attention d’Allah pour ceux qui œuvrent en ce sens est similaire pour ceux qui œuvrent à préserver les actes obligatoires de groupe.

Prenez soin, après les oraisons obligatoires de la Tariqa, de Hisbou Saïfi et Salat el Fatihi, car ils suffisent certainement face à tout autre Ouird. La grâce qu’Allah déverse par ce biais atteint le summum de ce que l’on peut désirer. Aucune œuvre ne peut les égaler.

Je vous recommande de prendre soin de vos liens familiaux dans tout ce qui adoucit le cœur et incite à l’amour, même si ce n’est qu’à travers le fait de s’inquiéter de leur état et de leur transmettre le salut. Abandonnez l’inimitié des proches, la désobéissance des parents et tout ce qui provoque la haine dans le cœur des frères. Abandonnez aussi la recherche des défauts des musulmans car celui qui agit de la sorte, Allah dévoilera ses défauts et ceux de ses enfants après lui.

Pardonnez beaucoup à ceux qui commettent des faux pas et trouvez des excuses à celui qui a agi avec maladresse, pour tout croyant et encore plus à l’égard de vos frères en Tariqa, car certes, ceux qui pardonnent aux gens, Allah leur pardonnera souvent. Acceptez les excuses de celui qui est venu vous les présenter après s’être trompé et pardonnez-lui afin qu’Allah vous pardonne et fasse rémission de vos faux pas. Les pires frères chez Allah sont ceux qui n’acceptent pas les excuses et ne taisent pas les erreurs. Examinez le verset d’Allah qui dit :

« Empressez-vous vers un pardon de votre Seigneur et un Paradis aussi large que les Cieux et la Terre, ayant été aménagé pour les gens pieux. [133] Ceux qui dépensent dans la richesse et la pauvreté, qui refoulent leur colère et qui pardonnent aux gens. Et Allah aime les gens de bien. [134] » (Sourate 03 La famille d’Imran, versets 133 et 134)

Soyez insouciants face aux maux des gens et ne prenez pas en considération ce qui vous provient de leur part. À vous de savoir pardonner et fermer les yeux. En effet, le fait de contester ce qui nous provient des gens, sans pardonner, entraîne de la part d’Allah la perte dans ce bas-monde et dans l’au-delà. Chaque fois que quelqu’un s’abaisse à répondre au mal par le mal, les maux se multiplieront alors pour lui et les affaires du serviteur se briseront. Ainsi, on ne doit répondre au mal qu’avec l’insouciance, le pardon et l’indulgence.

Je vous recommande de ne pas contester les positions dans lesquelles Allah a placé certaines gens, positions qui ne sont louables ni dans la loi ni dans les bonnes manières. En effet, leurs affaires ne suivent que la volonté divine, ils sont étreints par la prise d’Allah et n’ont aucune échappatoire ; toutes leurs affaires dépendent de Son décret et de Sa prédestination. Cela n’est permis que dans le cas où la loi ordonne d’agir contre eux, par l’incitation et la réprimande, dans certains cas et circonstances particulières, à certains moments et pas tout le temps. Arrêtez-vous à la parole du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qui dit :

« Ordonnez le bien et interdisez le mal. Lorsque tu verras une avarice obéie, une passion suivie et l’admiration de chacun pour ses propres opinions, occupe-toi alors de ta propre personne. »

« Fais partie du bel islam de quelqu’un de ne pas s’occuper de ce qui ne le regarde pas. »

Vous devez conseiller vos frères en Tariqa avec douceur, gentillesse et diplomatie, sans malveillance ni haine. Que chacun d’entre vous consacre un moment où il évoque Allah de manière solitaire, au moins le temps que nécessitent les oraisons essentielles de la Tariqa. Cela vous procurera la bénédiction dans tous vos besoins ainsi que dans votre conduite.

Vous devez obéir au mouqadem qui vous a conféré le Ouird, quoiqu’il ordonne comme bien et blâme comme mal, ou cherche à arranger les conflits entre vous. Accomplissez la wadhifa matin et soir pour celui qui le peut, sinon une seule fois le matin ou le soir […]

Je conseille au mouqadem qui transmet le Ouird de pardonner les erreurs des frères. Qu’il étende le manteau de son pardon pour toute erreur et qu’il évite tout ce qui peut être à même de provoquer dans leur cœur la rancune, la honte ou la haine. Qu’il œuvre à réunir les cœurs et arranger les conflits. Si jamais un feu s’attise entre eux, qu’il s’empresse alors de l’éteindre. Surtout, que cela soit accompli en vue de la satisfaction d’Allah, non en vue d’un avantage autre. Qu’il blâme également ceux qui s’adonnent à la médisance, les réprimandant avec bienveillance et en utilisant des paroles aimables.

Il se doit de traiter les frères avec douceur et facilité de caractère, en veillant à ne pas provoquer chez eux de l’aversion ou des difficultés dans ce qu’il ordonne ou défend, dans le domaine des droits divins et des droits des frères, se conformant en cela à la parole du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qui dit :

« Rendez les choses faciles et ne les rendez pas difficiles, annoncez la bonne nouvelle et ne répugnez point les gens. »

Il ne doit pas prêter attention à ce qu’ils possèdent de ce bas-monde ni rien leur en demander, avec la croyance ferme que seul Allah donne et prive, rabaisse et élève. Sa préoccupation doit être de les libérer du gaspillage relatif à la part de ce bas-monde qui leur a été accordée. Il ne doit pas leur demander quoi que ce soit comme don, dans le peu comme dans le beaucoup, excepté ce qu’ils donnent d’eux-mêmes sans qu’il y ait auparavant eu une demande, car les gens raisonnent suivant cela et interprètent leurs affaires à partir de cette notion.

Laissez-en paix, pour le commun comme pour les dirigeants, la situation dans laquelle Allah les a établis, sans vous opposer à eux avec répugnance, haine ou hostilité, car Allah a disposé sa créature dans ce qu’Il a voulu et personne n’a la capacité de les ôter d’où Allah les a établis. Délaissez la recherche de l’autorité et ses causes, car elle est la Kaaba autour de laquelle convergent tous les maux, le foyer de la perdition dans ce bas-monde et dans l’au-delà.

Si l’un de vous est éprouvé par un quelconque mal, qu’il patiente donc en attendant qu’Allah le libère, car toute difficulté a forcément une fin et chaque tourment a un jour son soulagement. Si la situation devient critique, le serviteur doit alors s’humilier tout en suppliant Allah pour qu’Il lui apporte la délivrance, atteignant ainsi le comble de son espérance.

Il ne faut pas s’affliger devant les malheurs, les épreuves et les difficultés, car certes Allah – qu’Il soit glorifié et exalté – n’a fait descendre Ses serviteurs dans ce monde que pour qu’ils se heurtent aux vicissitudes des décrets divins et des destins seigneuriaux, ce qui place le nafs dans un état de gêne.

Les serviteurs ne peuvent échapper à cela, il n’est pas possible à l’esclave d’être en repos face aux épreuves de ce bas-monde ; cependant, le sensé n’ignore pas que la situation des gens de ce monde est, pour toujours, en alternance entre des moments de resserrement et de relâchement, entre du bien et du mal, entre des moments de joie et de tristesse. Personne, dans ce bas-monde, ne peut échapper à cette fatalité.

Donc, si un malheur s’abat et que la situation se resserre, certainement il surviendra un moment où cela s’achèvera ; lui succédera alors la délivrance et la joie. Ainsi, celui qui a compris d’Allah ce qu’il en est de la gérance de ce monde, celui-là accueillera alors chaque malheur par la patience, la satisfaction vis-à-vis du destin et le remerciement complet à l’égard des bienfaits d’Allah.

Et que la paix soit sur vous ainsi que la miséricorde d’Allah.