Exhortations de Sidi Ahmed Tijani, qu’Allah l’agrée
Par le Nom d’Allah, et prière et salut sur le Messager d’Allah.
Voici des conseils destinés à ceux qui cherchent à les appliquer à eux-mêmes, et le conseil de notre Seigneur est englobé dans la parole du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qui dit : « La religion, c’est le bon conseil ». Les Compagnons (qu’Allah les agrée) dirent : « Envers qui, ô Messager d’Allah ? » Il dit : « Envers Allah, Son Livre, Son Messager, l’ensemble des croyants aussi bien que l’élite. »
Le premier de ces conseils est la crainte d’Allah, en dehors de qui il n’y a point de divinité, tel que l’imam ‘Ali (qu’Allah l’agrée) le prodigua à ses enfants quand il leur dit : « Ô mes fils, je vous exhorte à craindre Allah l’Immense en secret comme en public, à parler honnêtement dans l’agrément comme dans la colère, à être juste envers l’ami comme envers l’ennemi, et à être modéré dans la richesse comme dans la pauvreté. »
Ensuite, il faut se réfugier auprès d’Allah et s’en remettre à Lui face à l’étreinte de toute situation affligeante, et attacher son cœur à Lui (qu’Il soit exalté) autant que le permet la station à laquelle on est lié. Il faut une réserve respectueuse vis-à-vis de Lui (qu’Il soit exalté et glorifié) tel que cela est défini par la parole du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qui dit : « Ayez envers Allah une réserve respectueuse véritable. » Ils dirent : « Nous avons cette réserve respectueuse, qu’Allah en soit loué. » Il dit : « Ce que vous en dites n’est pas comme ce que j’en dis, car la réserve respectueuse consiste à préserver la tête et ce qu’elle contient, à sauvegarder le ventre et ce qu’il rassemble, à se remémorer la mort et ses épreuves, à délaisser la parure de ce monde pour celui qui aspire à l’au-delà. Celui qui accomplit tout cela possède alors une réserve respectueuse véritable envers Allah. »
Cette réserve mentionnée par le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) concerne le commun. La réserve des Véridiques, quant à elle, concerne l’esprit qui conduit le serviteur, par crainte révérencielle du Majestueux, à baisser la tête [devant ce qui est pourtant autorisé].
Certains Connaissants disent :
« Je le désire ardemment mais voilà ! Quand il se manifeste à moi,
Je baisse la tête par révérence !
Nullement de peur ! Mais par crainte révérencielle !
Et aussi pour sauvegarder Sa beauté !
Ainsi, je me détourne de lui en endurant patiemment,
Alors que je désire au fond de moi ne serait-ce que l’ombre de Son spectre !
Assurément la mort est dans Son retrait.
Et la vie par excellence est dans Son approche. »
Un certain Connaissant dit aussi (qu’Allah l’agrée) :
« Gloire à Celui qui, même si on se prosternait devant Lui en posant les yeux
Sur des pointes d’épines ainsi que sur des aiguilles ardentes,
Cela ne couvrirait point le centième de ses bienfaits !
Ni le dixième de ce centième, voire même le millième ! »
Puis il récita d’autres vers et disparut d’au milieu de la foule. Cela se déroulait lors du rassemblement de ‘Arafat. J’interrogeai alors les gens à son sujet et l’on m’affirma qu’il s’agissait de Abou ‘Oubeda Al Khawwas, qui, assurément, depuis quarante ans, n’avait pas relevé la tête vers le ciel par pudeur envers Allah. Cela est, sans aucun doute, la pudeur qu’ont les Connaissants.
Par ailleurs, le fait de se rapprocher d’Allah en délaissant toute attache, la traversée des obstacles, l’abandon de toute forme de laisser-aller, de toute équivoque ou réflexion, tout cela ne doit point se faire en vue de quelques biens ou par ruse envers Allah mais uniquement dans le but de répondre aux exigences que réclament la magnificence et la grande majesté divine, ainsi que par amour pour Son essence. Cela dépendra néanmoins de la station et du degré de chacun.
Celui qui aura été éprouvé par l’opposition à l’un de ces critères, qu’il retourne donc à Allah, s’humiliant, implorant Son pardon, s’abaissant avec dédain, reconnaissant devant Allah son impuissance et sa faiblesse. Il faut ensuite qu’il demeure auprès d’Allah en adoptant une attitude de soumission et de besoin, dans le dénuement et le désarroi, craignant par le cœur le trouble de Son assaut imprévisible ou une séparation d’avec Lui par un effet de Son stratagème caché.
Il faut s’imposer, pour Lui (glorifié et exalté), l’agrément et la soumission face à tout ce qui survient, sans aucun trouble ni vacillement, sans même émettre le désir de voir cela s’estomper, sauf s’il s’agit de l’œuvre du nefs. Qu’on s’empresse au repentir en tout ce qui a pu survenir comme œuvre s’opposant à la Loi, car il n’est pas permis de persister à l’endosser. Même si l’on ne sait pas qu’il s’agit là d’un ordre d’Allah, il n’y a pas d’excuses au fait de délaisser le repentir.
Qu’on œuvre aussi, à certains moments, à faire bénéficier les serviteurs d’Allah de ce qu’on détient entre les mains, non l’ensemble d’entre eux mais les particuliers, de proche en proche, sans excès ni négligence. Notre préoccupation doit être le respect des droits de ses frères dans la Tariqa, droits qu’il n’est pas possible de retarder, mais auxquels on se doit au contraire de toujours répondre sans désertion.
Toute personne sensée se doit d’avoir un temps où elle s’isole avec son Seigneur, moments qu’elle ne doit pas repousser, tout comme ceux où elle s’assoit avec ses frères dans la voie d’Allah en vue d’un rappel, d’un enseignement ou d’un profit dans des sciences qu’elle ne possède pas, sans excès ni négligence. Qu’on profite des moments les plus propices pour s’isoler avec Allah, comme au milieu de la nuit, lorsque les gens dorment, jusqu’à l’aube, ainsi qu’après la prière du soubh jusqu’au moment du douha, et après la prière du ‘asr jusqu’à celle du ‘icha.
Il faut œuvrer en cela avec bon sens, conciliant ce qu’il est possible de faire sans lassitude avec ce qu’on peut accorder comme relâchement à son nefs sans paresse, conformément au cadre d’action de la parole prophétique qui dit : « La religion, c’est l’aisance. Si une personne veut rivaliser avec la religion, elle le vaincra. Suivez plutôt la voie sage du juste milieu, rapprochezvous en douceur de la perfection et soyez optimistes. Aidez-vous en cela par vos allées et venues à la mosquée le matin, le soir et aux dernières heures de la nuit. » Et sa parole : « Cette religion est inébranlable, pénétrez-y avec douceur et ne rendez pas le culte de Dieu haïssable à vos âmes. Qui ne ménage pas sa monture ne pourra la conserver et ne parcourra pas de longues distances. » Et sa parole : « Prenez des œuvres ce dont vous êtes capable, car Allah ne Se lasse pas jusqu’à ce que vous vous lassiez ».
Qu’on prenne extrêmement garde aux assises et aux endroits d’où on prend la science qui amènent à détenir une emprise sur le commun des gens ou une influence dans les affaires de l’État. Celui qui agit de la sorte ne réussira ni dans ce monde ni dans l’au-delà. Son souci ne doit être au contraire que de s’occuper de ce qui le concerne particulièrement et personnellement. Et il ne doit pas laisser sous-entendre, dans ce qu’il apporte à ses frères, qu’il est le plus digne en cela, mais doit au contraire considérer qu’il ne peut lui-même se passer de ce moment.
L’imam Malek (qu’Allah l’agrée), interrogé sur la recherche du savoir, a dit : « C’est une bonne chose, mais ai connaissance de ce que tu te dois d’accomplir du matin au soir et accomplis-le ». Il insista sur les devoirs individuels ordonnés par Allah et qu’il n’est pas possible d’abandonner. Celui qui s’en détourne sous prétexte de la recherche du savoir a ruiné sa vie ici-bas et dans l’audelà. Et sa parole est véridique en cela.
Tu n’as qu’Allah – glorifié et exalté –, alors ne te détourne pas de Lui pour un autre et ne cherche pas de recours autre que Lui, ni de prétexte pour te détourner de Sa porte, ni d’autre refuge que Lui face aux difficultés, aux détresses et aux malheurs. Ne cesse pas d’exprimer la gratitude pour l’abondance et la succession de Ses bienfaits. La situation dans ce domaine correspond à la parole de Abou-l- ‘Abbas Mursi qui dit :
« Les instants du serviteur se départagent en quatre, sans cinquième :
– Soit tu te trouves dans un moment d’aisance, et alors le Vrai exige de toi de faire preuve de reconnaissance.
– Soit tu te trouves dans un instant de difficulté, et alors le Vrai exige de toi de faire preuve de patience.
– Soit tu te trouves dans un moment de désobéissance, et alors le Vrai exige de toi de faire preuve de repentir.
– Soit tu te trouves dans un instant d’obéissance, et alors le Vrai exige de toi de faire preuve d’espérance. »
Les classifications évoquées incluent l’ensemble des moments où se trouve le serviteur, comme le mentionne la parole du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) : « Celui qui reçoit et qui est reconnaissant, qui est éprouvé et qui patiente, qui est injuste et qui demande pardon, qui est opprimé et qui pardonne » ; ensuite, il se tut jusqu’à ce que certains membres de l’assise lui demandent : « Qu’ont-ils donc comme récompense, ô Envoyé de Dieu ? » Il dit : « Ceux-là ont la sécurité ; et ce sont eux les bien-guidés. »
Il veut dire (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) par « ont la sécurité », qu’ils sont en sûreté contre le châtiment d’Allah dans l’au-delà et bien guidés dans ce monde, tout en considérant, pour chacune des choses évoquées, que cela soit accompli sincèrement pour Allah, sans que cela ne soit mêlé à d’autres choses. Et ces conseils concernent les gens voilés […]
Quant à celui qui a atteint la Connaissance pure, jusqu’à s’y trouver raffermi, celui-là agira en fonction de son époque, son état et sa station. Sa manifestation n’implique pas une information sur son état, et ne le dissocie pas de sa situation avec Allah.
Wa salam.
Que la prière et la paix soient sur notre Maître Mohammed ainsi que sur sa famille et ses Compagnons.
Texte tiré du livre Djawahirou-l-Ma’ani
Recherche et traduction par la Zaouiya Tidjaniya El Koubra d’Europe