Le Tawassoul dans la tradition sunnite
Le Tawassoul dans la tradition sunnite
Une voie légitime vers la miséricorde divine
Introduction
Le tawassoul (التوسل) désigne le fait de rechercher la proximité d’Allâh à travers un moyen agréé : un acte pieux, un nom divin, ou une personne choisie par Allâh. Cette pratique est solidement enracinée dans le Coran, la Sunna, la vie des Compagnons, et les enseignements des grands savants de l’Islam sunnite.
Contrairement à certaines critiques contemporaines, le tawassoul ne contredit ni l’unicité divine ni l’éthique prophétique, à condition que le cœur reconnaisse qu’Allâh seul donne et exauce, et que l’intermédiaire n’est qu’un moyen d’accès par son rang et sa proximité.
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- Le tawassoul dans le Coran
Sourate An-Nisâ’ (4:64) :
{ S’ils viennent à toi, après avoir été injustes envers eux-mêmes, et demandent pardon à Allâh, et si le Messager demande pardon pour eux, ils trouveront Allâh Pleinement Accueillant au repentir, Très Miséricordieux. }
Ce verset est clair : la demande de pardon d’un croyant, renforcée par l’intercession du Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam), est une cause d’acceptation divine.
Les savants classiques, tels qu’Ibn Kathîr, An-Nawawî et Al-Qurtubî, ont affirmé que ce verset demeure valable même après le décès du Prophète.
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- Le Coran ordonne de chercher une waṣîlah
Sourate Al-Mâ’ida, verset 35 :
{ Ô vous qui avez cru ! Craignez Allâh et cherchez vers Lui un moyen (waṣîlah), et luttez dans Son chemin afin que vous réussissiez. }
Les exégètes classiques — Al-Ṭabarî, Al-Qurtubî, Ibn Kathîr — ont expliqué que la waṣîlah englobe les œuvres pieuses, les invocations et les personnes agréées auprès d’Allâh, comme les prophètes et les saints.
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- Le tawassoul dans la Sunna authentique
Le célèbre hadith de l’aveugle, rapporté par At-Tirmidhî et d’autres, montre que le Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam) lui-même a enseigné le tawassoul :
« Ô Allâh, je Te demande et me tourne vers Toi par l’intermédiaire de Ton Prophète Mohammad, Prophète de miséricorde… Ô Mohammad, je me tourne par toi vers mon Seigneur dans ce besoin… »
Ce hadith est authentique (ṣaḥîḥ). Il constitue une preuve explicite de la légitimité du tawassoul, tel qu’enseigné par le Prophète lui-même.
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- Le bédouin auprès de la tombe du Prophète
Ibn Kathîr rapporte dans son Tafsîr :
« Un bédouin vint à la tombe du Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam) et dit : “J’ai lu le verset : { S’ils viennent à toi… } Je suis donc venu, te prenant comme intercesseur.” »
L’Utbî, témoin de la scène, vit ensuite le Prophète en rêve, qui lui dit :
« Annonce au bédouin que son Seigneur lui a pardonné. »
Le poème qu’il récita :
Ô le meilleur de ceux dont les ossements furent ensevelis dans la terre,
C’est par ton parfum que le sol et les collines embaument.
Que mon âme soit le sacrifice pour la tombe où tu reposes,
Car elle contient la pureté, la générosité et la noblesse.
Ce récit est approuvé par les Imâms : An-Nawawî, Al-Qurtubî, Ibn Qudâmah, entre autres.
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- Le tawassoul pratiqué par les Compagnons
Dans Al-Adab al-Mufrad de l’Imâm Al-Boukhârî :
La jambe de Ibn ‘Oumar (qu’Allâh l’agrée) se paralysa. On lui dit : « Évoque celui que tu aimes le plus ! »
Il répondit : « Yâ Mouḥammad ! » Et sa jambe guérit aussitôt.
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- L’Imâm Mâlik et la direction de l’invocation
Le Calife Abou Ja‘far demanda à l’Imâm Mâlik :
« Dois-je me tourner vers la Qibla ou vers la tombe du Prophète ? »
Il répondit :
« Oriente-toi vers lui ! Il est ta waṣîlah auprès d’Allâh, comme il fut celle de ton père Âdam. »
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- La demande de pluie auprès de sa tombe
Rapporté par Ibn Abî Shaybah et Al-Bayhaqî :
Lors d’une sécheresse, un homme se rendit à la tombe du Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam) et dit :
« Ô Messager d’Allâh, demande la pluie pour ta communauté ! »
Il vit ensuite le Prophète en rêve lui annonçant que la pluie allait tomber.
Ce récit est accepté par Ibn Hajar, As-Subkî, Al-Qastalânî…
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- Le tawassoul avec les saints agréés
Le tawassoul ne se limite pas au Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam). Il est également permis, avec équilibre et sincérité, de recourir à des serviteurs rapprochés d’Allâh — les saints véridiques (awliyâ’), qu’ils soient vivants ou décédés — tant que le cœur reste orienté vers Allâh comme seul Exauceur.
Cette pratique a été clairement approuvée par de nombreux Imâms de référence :
– l’Imâm An-Nawawî,
– l’Imâm Ibn Hajar Al-Haytamî,
– l’Imâm As-Suyûtî,
– l’Imâm Taqiyy ad-Dîn As-Subkî,
– et de nombreux savants de Ahl as-Sunna wa-l-Jamâ‘a.
Mais au-delà des textes, le tawassoul est aussi reconnu, pratiqué et honoré dans toute la tradition soufie authentique, transmise par les maîtres de la voie, et confirmée par notre bien-aimé maître, Seyyidinâ Ahmed Tidjânî (qu’Allâh sanctifie son précieux secret), qui en a affirmé la légitimité dans ses enseignements.
Tant que le cœur reconnaît qu’Allâh seul exauce,
et que le wali n’est qu’un moyen de grâce choisi par Allâh,
le tawassoul par un saint est non seulement permis,
mais une manifestation d’amour spirituel et de fidélité aux proches d’Allâh.
Et c’est par Sa Faveur et Sa Miséricorde que les prières sont exaucées à travers ceux qu’Il aime.
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Conclusion
Les preuves que nous avons présentées — tirées du Coran, de la Sunna, des récits des Compagnons et des avis des Imâms — suffisent amplement pour éclairer les cœurs sincères, dissiper les doutes, et affermir la sérénité de ceux qui suivent la voie du juste milieu.
Elles nous invitent à éviter les polémiques stériles qui nuisent à l’union des croyants, et à rappeler avec douceur que seul Allâh connaît toute chose. La vérité ne se mesure pas à l’émotion, mais à la lumière des preuves.
En vérité, le tawassoul n’est pas une innovation, ni une offense à l’Unicité divine, mais bien une tradition noble, enracinée dans les pratiques des Prophètes, des Compagnons, des gens de science et des saints rapprochés. Il est un chemin vers la miséricorde d’Allâh, par les moyens qu’Il a Lui-même agréés.
À ceux qui le rejettent par ignorance ou par zèle mal guidé, nous rappelons que le respect de la diversité des avis au sein de l’Islam est un signe de maturité spirituelle et de crainte pieuse. Et à ceux qui y croient et le pratiquent, nous disons : persévérez avec sincérité, pureté d’intention, et attachement à la Sunna.
Et en tant que malikites, nous nous appuyons sur l’avis éclairé de notre imâm, Mâlik ibn Anas (qu’Allâh lui fasse miséricorde), qui autorisait le tawassoul par le Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam), aussi bien de son vivant qu’après sa mort. Il répondit à Abou Ja‘far :
« Oriente-toi vers lui ! Il est ta waṣîlah auprès d’Allâh, comme il fut celle de ton père Âdam. »
Et en tant que Tidjânis, nous nous abreuvons aux sources limpides des paroles lumineuses de notre maître, Sîdî Ahmed Tidjânî (qu’Allâh sanctifie son précieux secret), qui affirma sans équivoque :
« Celui qui se tourne sincèrement vers le Prophète (sallAllâhou ‘alayhi wa sallam) ne sera jamais repoussé. »
Puissent nos cœurs rester attachés à ceux qu’Allâh aime,
et nos âmes ne jamais se détourner de ceux qu’Il a choisis pour nous guider vers Lui.
Wa l-ḥamdu liLlāh Rabb il-‘Ālamīn.
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Le pauvre serviteur en Allah et disciple de Cheikh Ahmed Tidjani (qu’Allâh sanctifie son précieux secret),
Mohammed El Mansour El Mohieddine Tidjani